• A partir du 20 août et en quelques semaines, 589 romans vont surgir en librairie.

    D’où vient cette pratique qui n’existe qu’en France ? Qui sont les favoris cette année ?

     A quoi ça sert ?

    A participer à la course aux prix littéraires de l’automne, dont le Goncourt est le plus prestigieux (lire ­ci-dessous). Les prix sont des multiplicateurs de ventes : 400 000 exemplaires en moyenne pour un Goncourt, 200 000 pour le Renaudot, 150 000 à 200 000 pour le Femina, 130 000 pour le Goncourt des lycéens, 80 000 pour l’Interallié, 55 000 pour le Médicis.

    Le jeu en vaut-il la chandelle ?

    Sur le plan commercial, sortir autant de livres en même temps est une aberration. Combien auront une visibilité médiatique et une mise en valeur en librairie ? Quinze, vingt pour cent ? Même si la Toile et les réseaux sociaux augmentent les possibilités de toucher les lecteurs… Mais l’espoir d’un prix fait prendre ce risque, tout comme l’envie de participer à la fête médiatique. Durant cette brève période, les livres sortent des rubriques et des magazines spécialisés pour le prime time.

    Est-ce que tous les pays ont une rentrée littéraire?

    Non, c’est une spécificité française. Ni l’Allemagne, ni la Grande-Bretagne (malgré le «Super Thursday» d’octobre), ni les pays scan­­dinaves ou le sud de l’Europe ne connaissent un phénomène similaire. Les livres y sortent tout au long de l’année, au gré des saisons.

    Pourquoi cette spécificité française ?

    A cause, sans doute, de l’ancienneté du Prix Goncourt, remis pour la première fois en 1903 dans le but de défier l’Académie française. La plupart des prix littéraires européens n’ont été lancés qu’après-guerre. Autre spécificité française: trois prix ont été créés pour contrer l’autorité du Goncourt et sont décernés en même temps que lui, créant un effet de masse : le Prix Femina, dès 1904, avec un jury entièrement féminin qui fait la nique au jury alors exclusivement masculin du Goncourt ; le Renaudot, en 1926, voulu par dix journalistes littéraires lassés des choix du Goncourt, et le Prix Médicis, dès 1958, venu mettre l’accent sur les talents jeunes ou méconnus.

    Qui sont les favoris de 2015 ?

    Cette année, sur les cinq tirages à plus de 50 000 exemplaires, on trouve trois femmes: l’indéboulonnable Amélie Nothomb (200 000 exemplaires, lire ci-dessous), Delphine de Vigan (100 000 ex. pour D’après une histoire vraie) et Carole Martinez (60 000 ex. pour La Terre qui penche). Trois femmes parmi les locomotives d’un secteur culturel, c’est suffisamment rare pour être relevé. Autres gros tirages, Mathias Enard avec Boussole (60 000 ex.) et Christine Angot, 25 000 exemplaires pour Un Amour impossible. Mais les jurés ne suivent pas (toujours) les tirages et la courbe des ventes. Dans les rentrées dites fermées, un livre écrase d’emblée les autres, comme La Carte et le territoire de Michel Houellebecq en 2010, ou Les Bienveillantes de Jonathan Littell en 2006. Avec des effets pervers parfois, comme pour Royaume d’Emmanuel Carrère, donné grand favori en 2014 et grand perdant au bout du compte. En 2015, les jeux sont très ouverts.

    Et les Suisses ?

    Longtemps, les éditeurs de Suisse romande n’ont pas suivi la rentrée littéraire française. Quelques titres étaient publiés au moment du Salon du livre de Genève. Depuis la création, en 2009, du Salon d’auteurs Le Livre sur les quais à Morges, qui a lieu pile au début de la rentrée littéraire française, l’alignement des planètes entre Paris et la Suisse romande s’est produit. Et la rentrée suisse 2015 en impose. Zoé à Genève publie quatre titres dont deux valeurs sûres, La Veuve et l’enfant de Daniel Maggetti et Sur ses pas de Jean-Bernard Vuillème, et un premier roman, L’Œil de l’espadon, d’Arthur Brügger. Quatre titres aussi chez Bernard Campiche, dont La Mer des ténèbres d’Elisabeth Horem, Pap’s d’Antonin Moeri et Le Mur grec d’Olivier Verdan. L’Age d’Homme pour sa part publie sept titres, dont les deuxièmes romans d’Antoine Jaquier (Avec les chiens), Damien Murith (Les Mille Veuves) et Thomas Kryzaniac (Vivarium). La Baconnière à Genève suit Florian Eglin avec le dernier tome de sa trilogie, Solal Aronowicz-Holocauste.

    Et les non-francophones ?

    Trois poids lourds de la littérature américaine s’alignent : Toni Morrison (Prix Nobel 1993), Martin Amis et feu David Foster Wallace.

    Un thème se détache-t-il ?

    La tendance est la multiplication des romans biographiques, qui racontent, avec plus ou moins de liberté, des vies de personnages réels, illustres ou méconnus. Bernard Chambaz s’intéresse ainsi à Vladimir Poutine, Yasmina Khadra à Kadhafi et Anne Saulay à Jean-Luc Mélenchon. Les écrivains célèbres inspirent aussi : Judith Perrignon raconte les derniers jours de Hugo (Victor Hugo vient de mourir, L’Iconoclaste) et Olivier Saison imagine un marquis de Sade devenu libraire au Mexique dans Sade à Acapulco (Cambourakis). Simon Liberati parcourt l’enfance manipulée de son épouse dans Eva, fille de la photographe controversée Irina Ionesco, et la Genevoise Douna Loup s’attache à deux poètes malgaches extraordinaires, Jean-Joseph Rabearivelo et Esther Razanadrasoa dans L’Oragé (Mercure de France).

    Alors, 2015, un bon cru ?

    Quand les jeux sont très ouverts comme cette année, les surprises et les découvertes sont au rendez-vous. Nouveaux talents, genres moins convenus, tout est possible. Alors, oui, elle est très belle, cette rentrée 2015. ..

    Lisbeth Koutchoumoff 


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  • Printemps des poètes 2009

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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